Texte-devinette pour les CM2
Le dixième anniversaire de Clara arriva très vite. Je m'étais promis de lui dire toute la vérité ce jour-là.
Nous parvînmes à réunir assez d'enfants pour que la fête soit réussie. Nos invités partirent vers cinq heures du soir. Je laissai Clara jouer avec ses cadeaux pendant que je rangeais le buffet et les jouets épars. Elle en fit vite le tour: comme d'habitude, les cadeaux, pourtant choisis soigneusement, ne correspondaient ni à son intelligence ni à ses goûts. Elle m'aida à terminer la remise en ordre de l'appartement, puis nous préparâmes ensemble le dîner dont Clara, pour prolonger un peu le bonheur de cette journée spéciale, avait composé le menu.
Enfin, nous nous mîmes à table.
— Papa et Maman auraient beaucoup aimé cette fête, commençai-je, ne sachant pas comment orienter la conversation dans le sens que je souhaitais.
Bien sûr, Clara m'aida, comme elle semblait en avoir le secret chaque fois qu'il fallait aborder un sujet délicat.
— Il y avait presque autant de monde que la dernière fois, fit-elle.
— Tu dois confondre, ma chérie.., ton dernier anniversaire, nous l'avons passé toutes les deux. Tu t'en souviens?
— Non, pas celui-là, rétorqua-t-elle un peu agacée. Je sais ce que je dis.
— Comment ça? demandai-je en hésitant.
— L'autre anniversaire! Il y a longtemps.
J e me levai d'un geste, si brusquement qu'un éclair d'inquiétude naquit dans ses yeux, et je m'agenouillai devant elle.
[...]
— tu as compris? Comment?
— Tu te souviens, la semaine après la mort de Papa et de Maman? Quand nous sommes retour nées à la maison pour trier les affaires? Tu m'as donné le trousseau de clés en me demandant de tout ouvrir.
Le bureau! Comment est-ce que j'avais pu oublier?
— J'ai trouvé les albums photos, enfermés dans le secrétaire. Il y avait
les photos de nos anniversaires...
Elle renifla un peu, ravalant des larmes causées par l'évocation
du souvenir de nos parents, ou peut-être par la découverte de nos mensonges.
— Pourquoi est-ce que vous m'avez menti, Coraline?
— Nous ne voulions pas que les autres sachent, qu'ils te harcèlent. Et nous
avions peur que tu ne laisses échapper la vérité par mégarde !
Elle me lança un regard lourd de reproche, et je compris
combien nous avions en tort de la sous- estimer.
Nous restâmes longtemps éveillées, cette nuit- là; Clara n'accepta d'aller
se coucher que quand j'eus terminé de tout lui raconter.